Petite formule spectaculinaire pour objets, marionnettes et deux comédiennes.
A partir de 12 ans.
Ce spectacle est une plongée dans le conte cruel du petit Chaperon Rouge.
Monde mouvant, minuscule et imprévisible.
Ici, ustensiles de cuisine, marionnettes et manipulateurs se glissent dans la peau des personnages et nous entraînent à la dérive de nos fantasmes dans un univers d'une poésie tendre et saignante.
Jeu : Claire Rosolin et Flore Audebeau
Mise en scène et régie : Marion Gardie
Marionnettes et masques : Marion Bourdil
Musique d'introduction et harmonisation des chants : Julien Lot
Crédit Photo by Modjo
Tout commence à Prague avec un défi lancé par Marek Becka (Cie Buchty a Loutky) : créer un spectacle d’objets pour adultes abordant le tabou d’un conte.
Le choix du conte du Petit Chaperon Rouge est parti du désir de reprendre l’histoire qui nous avait bercé toute notre enfance. En donner notre point de vue d’adultes pour ressusciter le plaisir intense de la peur du Grand Méchant Loup.
Nous sommes allées puiser non dans le conte moraliste de Perreau mais à l’origine populaire Nivernaise de cette légende (tradition orale) dont l’issue diffère largement de celle que l’on connaît : Le loup, après avoir mangé une partie de la grand mère, met le reste de la viande dans une assiette et le sang dans une bouteille qu’il donne au Chaperon en guise de repas. Un chat témoin de la scène dit d’ailleurs :
« Pu salope qui mange la chair et le sang de sa grand ».
Puis le loup invite la jeune fille à le rejoindre dans le lit et tente d’avoir un rapport sexuel avec elle. Innocente mais pas si naïve l’héroïne voit venir l’embrouille et prétexte une terrible envie de déféquer pour sortir de la maison.
Le loup méfiant s’assure une surveillance à distance grâce à une cordelette attachée à la cheville de l’enfant .Une fois sortie, elle détache la corde, la noue à un piquet et s’enfuit. Le geôlier découvre trop tard cette ruse et malgré une folle poursuite ne parvient pas à la rattraper.
Ce qui nous a frappé dans cette version c’est que l’initiation sexuelle est associée à l’anthropophagie lourdement symbolique puisqu’il s’agit de manger son aïeule (tabou complètement évacué de la version couramment racontée.) Nous avons donc ressorti les vieux chiffons, injecté des remous dans la paisible conscience collective et des doutes sur notre façon d’interpréter le monde.
Pour entrer au cœur de cette surprenante transmission intergénérationnelle, nous avons immergé notre histoire dans l’univers de la cuisine:
Et bien sur, nous sommes les cuisinières, à la fois initiatrices et témoins de la narration. Témoin parfois neutre et distant, parfois engagé, prenant parti, allant même jusqu’à interpréter les personnages pour mieux se fondre dans la légende, pour mieux la comprendre. Au point que l’on ne sache plus si l’on raconte l’histoire des objets ou celle des manipulateurs. Puis nous avons ajouté à notre distribution trois marionnettes en bois de dix centimètres de haut issues du théâtre de marionnettes tchèque du 18ème siècle.
Elles réinsèrent dans le spectacle l’empreinte traditionnelle et populaire du conte, démultiplient les facettes de nos personnages pour nourrir l’universalité du discours.
De janvier à septembre 2006, ce spectacle a voyagé en République Tchèque, en Slovaquie, puis en France.
Nous l’avons laissé fermenter jusqu’à décembre 2008.
Arrivées en France nous avons rencontré Marion Gardie qui a apporté son regard sur la mise en scène.
Notre sujet étant d’aborder les tabous qui se tissent dans l’intimité de nos cercles humains, nous avons cherché un lieu où retrouver les conditions sociales de cet enjeu.
Depuis Avril 2010, au delà de l'expérience du plateau de théâtre nous élargissons notre territoire d'expression dans des bars et chez l’habitant, où nous partageons spectacle, vin, nourriture et paroles.